» Je ne te dis pas jusqu’à sept fois,
mais jusqu’à 70 fois sept fois. “
Nous connaissons bien cette répartie de Jésus en réponse à la question de Pierre : « Seigneur, quand mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? »
Celui-ci pensait faire bonne mesure en allant jusqu’au chiffre sept, le chiffre parfait, alors que les rabbins de l’époque estimaient que l’on pouvait pardonner jusqu’à trois fois.
La réponse de Jésus reprend, en l’inversant, le chant féroce de Lamek, un descendant de Caïn (Gen. 4,24) : « Caïn est vengé sept fois, mais Lamek soixante dix fois sept fois ». A l’engrenage de la vengeance, il substitue la spirale contagieuse du pardon sans mesure.
La parabole du débiteur impitoyable qui suit nous place devant ces deux logiques, ces deux lois que nous pouvons choisir pour guider nos vies :
La Loi du Royaume, celle où le pardon de Dieu est accordé gratuitement à tous, aussi énorme soit la faute, si on est capable d’en appeler humblement à sa bienveillance ; et celle de la justice humaine où toute faute doit être payée.
La pointe de la parabole nous indique que nous serons traités selon nos propres agissements : si, de par notre baptême, nous n’avons pas compris que nous sommes les premiers bénéficiaires du pardon immérité reçu de Dieu, nous nous excluons nous-même du Royaume et nous serons jugés selon la loi humaine qui a guidé notre vie. C’est ce que nous disons dans la prière du Notre Père : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. »
Alors que notre pape François s’apprête à publier sa troisième encyclique sur la Fraternité (“Fratelli tutti“ – “Tous frères“), cette invitation de Jésus à pardonner gratuitement nous encourage, en cette fête paroissiale de début d’année scolaire, à redonner tout son sens à ces liens fraternels au sein de notre communauté.
Même si le pardon est une pratique de plus en plus étrangère à notre monde – quel est le parent qui ne dirait à son enfant qu’il vaut mieux ne pas se laisser marcher sur les pieds et se défendre quand il est agressé ? – elle est pourtant essentielle pour construire des relations de fraternité entre des hommes qui sont malheureusement faillibles ; quel est le couple qui n’a pas eu à se pardonner quelque chose un jour ?
Ainsi, sans oublier le mal ou l’injustice qui nous a peut-être blessé un jour, sachons puiser dans notre foi la force de prier avec Celui qui a pardonné le premier : « Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. »
Père Luc de Saint-Basile
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