Fêter le baptême du Seigneur, c’est un moment solennel dans la vie liturgique de l’Église, c’est une sorte de résumé de tout ce que nous avons entendu depuis un mois environ, dans les jours qui précèdent la fête du baptême du Seigneur. […] De l’Épiphanie au Baptême, la liturgie nous montre, à travers des épisodes évangéliques, que la puissance de Dieu est à l’œuvre dans la vie de Jésus. Jésus n’est pas simplement un modèle extraordinaire : il est bien le fils de Dieu, armé de la puissance qui se manifeste à travers lui. Les évangiles que nous avons entendus ces jours-ci disaient la belle prédication de Jésus, sa parole qui porte, et qui porte du fruit de conversion. La parole de Jésus est la parole de Dieu ; la parole de Dieu est une invitation permanente à la conversion, à la transformation des cœurs, et cela c’est la puissance de Dieu qui agit dans nos propres cœurs à l’écoute de la parole de Jésus. […]
Ce Jésus n’est pas simplement un homme extraordinaire, il agit avec la puissance de Dieu et, dans le baptême, nous voyons bien que c’est cette puissance de Dieu qui se manifeste : à travers le baptême, il est révélé que Jésus est fils de Dieu, celui que Dieu aime, celui qu’il a envoyé pour notre conversion et pour notre acheminement vers le Royaume de Dieu. Voilà le grand mystère que nous fêtons dans le baptême du Seigneur et dans lequel nous comprenons que nous sommes appelés sur un chemin tout à fait extraordinaire, une destinée des hommes qui les ouvre à une espérance que le monde ne porte pas facilement.
Nous avons entendu notamment le Livre d’Isaïe, et je cite ceci qui me paraît très suggestif : « Monte sur une haute montagne, toi qui portes la Bonne Nouvelle à Sion ». Et la Bonne Nouvelle qu’il s’agit de porter, c’est bien celle que je viens de dire : Dieu est tellement proche des hommes que, dès avant la venue du Sauveur, il se montre porteur de Bonne Nouvelle à travers ses prophètes. Mais ce qui est intéressant c’est que, dans le texte que je viens de vous lire, les spécialistes de la Bible disent qu’il y a deux traductions possibles. Celle que nous venons d’entendre.
Mais il y a une autre traduction possible, qui est : « Monte sur une haute montagne, Sion, sois une bonne messagère. » Ce n’est pas tout à fait la même chose. « Sois une bonne messagère », cela veut dire non seulement « tu as reçu la Bonne Nouvelle grâce au prophète », mais « maintenant c’est toi qui es le prophète, c’est toi qui dois annoncer depuis Sion la Bonne Nouvelle au monde. » C’est très important pour nous, la Bonne Nouvelle du baptême de Jésus, la Bonne Nouvelle de la venue comme un homme du Fils de Dieu : nous ne pouvons pas le garder pour nous. Alors nous sommes entraînés, par Jésus, à entrer dans son mystère et dans sa vie ; nous sommes entraînés par Jésus à ce qu’il va vivre et qu’il nous fait vivre avec lui. […]
Quand nous nous préparons au baptême, quand nous préparons des enfants au baptême, quand des adultes se préparent au baptême – et ils sont de plus en plus nombreux à Paris, en France et ailleurs dans la société sécularisée que nous connaissons – nous disons et ils disent : « j’attends quelque chose de Dieu et je sais que Dieu va me le donner. »
Alors nous pouvons estimer que nous ne sommes qu’une petite paroisse, la paroisse d’un petit quartier : est-ce que cela a de l’importance pour le monde entier qui va être sauvé ? Bien sûr que cela a de l’importance ! Nous sommes une communauté chrétienne et comme Sion, comme Jérusalem, nous sommes chargés d’annoncer la Bonne Nouvelle, monter sur une haute montagne, être vus, être repérés comme des témoins de l’amour de Dieu universel.
On peut se dire cela, et je voudrais l’affirmer en citant le pape François dans l’encyclique Dilexit nos (Il nous a aimés) qu’il a donnée il y a quelques semaines, sur l’amour du cœur de Jésus. Il y rappelle que nous sommes faits pour redonner avec Jésus du cœur à ce monde et, comme dit le pape dans la conclusion de cette encyclique, que nous sommes faits pour réinventer l’amour là où nous croyons qu’est morte la capacité d’aimer. Nous sommes faits pour cela : redonner cœur et réinventer l’amour là où nous croyons que cette capacité d’aimer est morte.
Que le Seigneur nous y aide et que nous ne nous considérions pas comme perdus pour cela dans le monde sans espérance d’aujourd’hui : soyons des signes et des pèlerins d’espérance.
+Laurent Ulrich, archevêque de Paris
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