“Il faisait encore sombre “
Ce matin de Pâques, il fait sombre sur notre monde touché par la pandémie… dans notre Église éprouvée … et sur l’homme qui s’inquiète pour son avenir…
Ce matin de Pâques, il fait sombre dans nos cœurs, alors que nous sommes dans l’impossibilité de nous retrouver ensemble pour célébrer la résurrection du Seigneur. L“Alleluia“ pascal ne résonne pas aussi joyeusement quand on est confiné chacun chez soi, avec la menace d’un virus qui peut à tout moment frapper nos proches.
À ces inquiétudes et à ces doutes, l’Évangile nous répond ce matin qu’il faisait encore sombre quand les saintes femmes se rendent au tombeau. Et pourtant le tombeau était ouvert et Jésus est déjà ressuscité !
Les visages des deux disciples s’en retournant vers Emmaüs étaient encore bien sombres, malgré le fait qu’ils aient entendu des femmes annoncer qu’elles l’avaient vu. Pourtant Jésus cheminait avec eux, mais leurs yeux ne savaient pas le reconnaître.
Ce petit matin de Pâques Pierre et Jean, courent eux aussi au tombeau.
L’évangéliste, dans un raccourci saisissant, résume à l’aide de deux verbes le passage brusque qui se produisit en lui ce jour-là :
“Il vit“. Qu’a-t-il vu en fait ? Le tombeau ouvert et vide.
“Il crut “. C’est comme si une révélation lumineuse était venue tout éclairer d’un jour nouveau : “Jusque-là, en effet, les disciples n’aient pas compris que, d’après l’Ecriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts. “
Ainsi la foi ne nécessite plus de voir ou de toucher. Un simple signe suffit.
Et petit à petit, tous ceux pour qui la vie du Christ a compté vont eux aussi passer de l’inquiétude à la joie, de l’incompréhension à l’évidence, des ténèbres à la lumière de la foi.
C’est comme si la résurrection du Christ les touchait chacun dans leur être le plus profond : « Ressuscités avec le Christ » dira St Paul.
Mais il faudra du temps, cinquante jours nous dit l’évangéliste Luc, pour que tous les disciples effectuent eux aussi cette “Pâque intérieure“ et osent sortir de leur confinement pour proclamer devant tous, avec le souffle de l’Esprit Saint : “ Celui qu’ils ont supprimé en le suspendant au bois du supplice, Dieu l’a ressuscité le troisième jour. “ (1ère lecture)
Le monde n’a pas brutalement changé au matin de Pâque, par quelque coup de baguette divine !
Mais avec Nicodème, Marthe et Marie, les apôtres, Marie Madeleine et les autres femmes, et tous les saints de tous les temps, nous poursuivons chacun notre chemin dans la foi. Le monde n’est pas bouleversé mais, dans nos nuits les plus ténébreuses vécues avec Jésus en sa Passion, une lumière s’est levée qui ne pourra jamais s’éteindre.
Et si nous trouvons le monde encore trop obscur, c’est à nous de lui porter la lumière.
Pour ce faire il nous faut accepter de nous déconfiner à l’intérieur de nous-même !
Cela signifie de ne pas avoir comme seul souci nos cercles affectifs les plus proches – ce qui reste bien légitime, surtout en ces temps difficiles – mais aussi montrer notre attention aux plus fragiles, connus et inconnus. D’ici et de bien ailleurs. Garder le souci de l’avenir de la terre-mère, de l’avenir de tous. Sortir de soi en restant chez soi !
« Car le Dieu qui a dit : La lumière brillera au milieu des ténèbres, a lui-même brillé dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de sa gloire qui rayonne sur le visage du Christ » (2Co 4,6).
Père Luc de Saint-Basile
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