Retour aux sources de l’Eucharistie….
Nous célébrons ce jeudi saint le don que Jésus nous a fait de ce sacrement de l’Eucharistie qui est au cœur de notre vie de foi ; et les textes que nous lisons chaque année nous rejoignent dans l’inopiné de notre confinement actuel, car ils sont tous nés dans le même contexte.
Dans la nuit de la première Pâque (1ère lecture), les hébreux sont invités à rester chez eux et ne survivront à l’Ange de la mort qui frappera les premiers nés des égyptiens que parce qu’ils sont confinés, après avoir marqué leurs portes du sang d’un agneau.
C’est aussi dans une maison, le Cénacle, que Jésus va célébrer la Pâque nouvelle avec ses apôtres, comme le refont nos frères juifs ce même jour, hasard du calendrier. En offrant le pain et le vin, Jésus préfigurait le don de sa vie sur la croix, corps livré et sang versé pour nous sauver de la mort et nous ouvrir le chemin d’une vie nouvelle.
Et ce sont dans leurs maisons que les premiers chrétiens vont célébrer l’eucharistie : “ Tous les croyants vivaient ensemble […] ils rompaient le pain dans les maisons, ils prenaient leurs repas avec allégresse et simplicité de cœur. “ (Act 2,48).
Bien sûr, l’union spirituelle, même devant un écran, ne remplacera jamais une assemblée eucharistique : comment faire corps, sans corps, communier sans communion, être présent en étant absent ?
Pourtant notre ancien archevêque André XXIII, dans un interview récent dans Paris Notre Dame nous rappelait : “ La grâce de Dieu n’est pas limitée par les sacrements. La grâce de Dieu réside dans la profusion de son amour. Cette privation est peut-être l’occasion de reprendre conscience que les sacrements ne sont pas des rites sociaux que l’on fait par habitude mais vraiment une rencontre avec Dieu. Si elle n’a plus le support visible des signes liturgiques, sa réalité demeure. “
Un des rites importants de ce jeudi saint est de refaire “en mémoire de Lui“, ce geste du lavement des pieds que Jésus a effectué pour chacun de ses apôtres, même Judas.
Au-delà du rite que nous ne pourrons pas refaire cette année, saurons-nous nous interroger sur le sens concret que nous lui donnons dans les choix de vie que nous faisons aujourd’hui.
Dans le même interview notre ancien archevêque disait : “ Le système dans lequel nous vivions était un système paradoxal. D’un côté, il exaltait la dimension universelle et internationale ; de l’autre, il ne tenait compte que de l’individu. C’était l’individu versus le monde entier. Or, on comprend aujourd’hui que l’individu n’est pas le summum de l’existence humaine. L’individu ne peut vivre que s’il est dans un système de relations et donc dans un système de solidarité avec le monde. Celle-ci ne consiste pas à déporter le travail à l’endroit où il est le moins cher. Mais bien à reprendre conscience de nos solidarités immédiates, de reprendre conscience qu’une nation n’est pas simplement une somme d’individus indépendants les uns des autres, mais bien une collectivité dans laquelle tous dépendent de tous. La question posée aux jeunes adultes d’aujourd’hui est : qu’allez-vous rechercher ? La situation la plus profitable pour vous ? Ou bien le désir de faire entrer, d’une façon ou d’une autre dans l’élaboration de votre projet, la question du service des autres ? “
Au sein de nos confinements respectifs sachons redécouvrir que même le manque eucharistique, tellement étrange, tellement rude pour les catholiques que nous sommes, peut révéler en creux la présence agissante de Celui qui peut seul infecter nos cœurs de son Esprit vivifiant.
Père Luc de Saint-Basile
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