“Voici ton roi qui vient vers toi
monté sur une ânesse “
Aujourd’hui, Jésus entre triomphalement à Jérusalem, la ville “belle et altière“ (Ps 48,3), choisie par Dieu pour y établir sa demeure. Elle est aussi celle “qui tue les prophètes et lapide ceux qui [lui] sont envoyés “ (Mt 23,37).
Aujourd’hui “le peuple, en foule, étend ses vêtements sur la route. Certains coupent des branches aux arbres et en jonchent le chemin “. Ceux qui marchent devant Jésus comme ceux qui le suivent peuvent bien s’écrier : “Hosanna au Fils de David ! Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient ! Hosanna au plus haut des cieux ! “ (Mt 21,8-9). Mais demain, ces mêmes foules réclameront à Pilate que Barabbas, un bandit, soit libéré. Sur Jésus, elles crieront alors par deux fois : “Crucifie-le ! “ (Mc 15,13-14).
Pour nous, alors que nous arrivons au terme d’un carême inédit qui se conclut cette année par cette fête des Rameaux célébrée chacun chez soi, il est temps de faire un premier bilan des appels à la conversion que nous avons discerné pendant ce long jeûne imposé, et qui va durer… au-delà de Pâques.
Au-delà de l’arrêt (très relatif pour certains) de nos activités habituelles et la privation de notre liberté de sortir, qu’est ce qui nous aura finalement le plus manqué ? Le fait de ne plus maîtriser notre avenir ? Les gestes d’affection et les étreintes avec nos proches ? La proximité avec des parents ou anciens qui vivent seuls ? L’école pour les enfants…et les parents ? la contemplation de la nature qui renaît au printemps ? Nos eucharisties dominicales dans toutes leurs dimensions ? ….
Comme certains en ont peut-être déjà fait l’expérience dans le désert, nous avons repris conscience des richesses que nous possédions alors sans en mesurer vraiment l’importance.
Un jour – il finira bien par arriver ! – nous serons à nouveau autorisés à reprendre notre vie ordinaire et ce sera certainement une explosion de joie et de fêtes des retrouvailles. Mais, à la différence de ces foules versatiles de Jérusalem, saurons-nous alors toujours privilégier ces choses simples de la vie, mais si essentielles, que nous aurons redécouvert pendant ce singulier carême.
Aujourd’hui – comme le jour des Rameaux ! – les foules crient et applaudissent tous les soirs à leur fenêtre les personnels soignants ainsi que ceux dont le métier est essentiel pour nous permettre de vivre normalement, mais comment réagirons-nous une fois l’épidémie vaincue ? Serons-nous capables de réels sacrifices pour nous redonner un système de santé suffisamment armé pour répondre à de nouvelles crises ?
Beaucoup de gestes de solidarité se sont manifestés envers les personnes âgées et les plus fragiles pendant cette période difficile pour eux ; saurons-nous les prolonger quand chacun aura repris le rythme normal de ses activités ? ….
En méditant aujourd’hui la Passion de Jésus Christ dans l’évangile de St Matthieu, nous voyons que même l’apôtre Pierre fait la douloureuse expérience qu’il y a une distance entre son désir sincère de suivre le Christ dans la fidélité, et la réalité concrète de ses capacités effectives. C’est toute l’ambiguïté de la fragilité humaine qui se retrouve au cœur de cette fête des Rameaux et qui est d’abord, pour nous, un appel à l’humilité.
En entrant dans cette semaine sainte qui est le chemin vers la vie nouvelle, laissons-nous entraîner par le Christ Jésus dans la radicalité de sa fidélité et de son obéissance : “Il s’est fait obéissant jusqu’à mourir et mourir sur une croix “ (Ph 2,8, 2ème lecture).
Alors peut-être pourrons-nous dire avec saint François “Loué sois-Tu, ô Seigneur, pour fratello (frère) Coronavirus, qui nous a réappris l’humilité, la valeur de la vie et la communion ! “.
Père Luc de Saint-Basile
PS1 : Nous essaierons de vous proposer une petite méditation pour vous aider à célébrer chez vous chacun des jours du triduum pascal.
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